Tunisie

Statut : en moratoire sur les exécutions

Date de la dernière exécution

1991

Nombre de condamnations à mort en 2019

Au moins 47

Nombre de détenus condamnés à mort fin 2019

95

Application de la peine de mort et conditions de détention des condamnés à mort

La situation des détenus condamnés à mort

Jusqu’en 1995 et 1996, les condamnés à la peine capitale ont vécu l’isolement, enfermés dans des cachots, le plus souvent enchaînés, y compris la nuit. En janvier 2011, dans le sillage des manifestations populaires ayant abouti à la chute du régime dictatorial de Zine el-Abidine Ben Ali, la Révolution a mis fin aux abus les plus choquants dont étaient victimes les condamnés à mort.

Ils ont notamment été à nouveau autorisés à bénéficier de la visite de leur famille proche et à recevoir des couffins de nourriture, deux fois par semaine. Durant toute leur incarcération, jusqu’à la commutation de leur peine en 2012, les condamnés à la peine capitale ont vécu dans la terreur de leur exécution et ont développé des pathologies liées au syndrome du couloir de la mort. Les prisonniers ont souffert de l’isolement puis de la promiscuité, du manque d’hygiène et d’une nourriture qu’ils jugent « infecte ». Les conditions matérielles de détention des prisonniers se seraient paradoxalement dégradées depuis la Révolution, car les prisons sont frappées par des restrictions budgétaires ou des pénuries. Même si la situation varie énormément d’un établissement à l’autre, en fonction de la centralité ou de l’enclavement de la région où il se situe, le suivi médical et psychologique des condamnés à mort est globalement défaillant.

Un grand nombre de prisonniers usent et abusent d’anxiolytiques et de psychotropes, qui semblent leur être généreusement distribués pour acheter une forme de « paix sociale ».

Les condamnés à mort n’ont pas eu accès aux programmes de formation éducative, professionnelle et technique et n’ont pas eu la possibilité de travailler. Il n’existe aucun dispositif d’accompagnement ou d’aide à la réinsertion dont pourraient bénéficier les condamnés à mort graciés et libérés, qui sont donc abandonnés à eux-mêmes au moment de leur sortie de prison.

Grâces

L’article 50 de la Constitution tunisienne dispose que : « Le Président de la République a le droit de faire grâce. » Vingt-cinq condamnés à mort ont bénéficié d’une « grâce spéciale » décidée le 14 janvier 2012 par le président Moncef Marzouki. Leurs peines ont été commuées en peines de prison à perpétuité. Neuf d’entre eux, les plus anciens, ont été libérés le 14 janvier 2013 après avoir passé plus de deux décennies en détention, dans des conditions inhumaines.

Evolution du nombre de condamnations à mort sur les 10 dernières années

Le cadre législatif national

La Constitution

La Constitution adoptée en 2014 ne traite pas directement de la peine de mort mais indique dans son article 22 : « Le droit à la vie est sacré. Il ne peut y être porté atteinte, sauf dans des cas extrêmes fixés par la loi. ». L’introduction de ce caractère d’exception légitime l’existence de la peine de mort dans l’arsenal juridique tunisien. L’article 77 précise que c’est le Président de la République qui est habilité à accorder la grâce.

Le Code pénal

L’article 5 du Code pénal prévoit que la peine de mort fait partie des peines principales en matière criminelle.[1] Les articles 7, 8 et 9 du Code pénal précisent les conditions d’application de la peine de mort. La condamnation à mort est exécutée par pendaison. Les femmes enceintes ne peuvent être exécutées qu’après avoir accouché (article 9) et les mineurs ne peuvent être condamnés à la peine de mort (article 43).

Un nombre important d’infractions sont passibles de la peine de mort en Tunisie. Il existe deux catégories d’infractions : les crimes de droit commun (homicide, viol aggravé, enlèvement suivi de mort) et les infractions à caractère politique ou militaire (attentat à la sûreté intérieure ou extérieure de l’État, haute trahison). Les infractions de droit commun sont passibles de poursuites devant les juridictions de droit commun. Les infractions à caractère politique sont passibles de poursuites devant les tribunaux civils ou militaires.

19 dispositions prévoient l’application de la peine de mort dans le Code pénal.

[1] Code pénal tunisien, disponible en ligne : https://www.ilo.org/dyn/natlex/docs/ELECTRONIC/61250/60936/F1198127290/TUN-61250.pdf

Le Code de justice militaire

Le Code de justice militaire s’applique lorsqu’un militaire ou un bien militaire est impliqué. Il prévoit dans son article 45 une exécution par balle et contient 19 dispositions relatives à la peine de mort.

La loi organique n°2015-26 du 7 août 2015, relative à la lutte contre le terrorisme et la répression du blanchiment d’argent

Le 25 juillet 2015, le Parlement tunisien a adopté une nouvelle loi antiterroriste à une très large majorité (174 voix pour, 10 voix contre et aucune abstention). Ce texte a introduit la peine de mort pour une série de crimes « terroristes ». La peine de mort était absente de la précédente loi antiterroriste de 2003. La nouvelle loi contient 16 dispositions qui prévoient l’application de la peine de mort.

Au total, ce sont donc 54 dispositions législatives qui prévoient l’application de la peine de mort.

Le cadre juridique international

TEXTE

DATE DE RATIFICATION OU D’ADHESION

Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, 1966 18 mars 1969
Second Protocole facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques (relatif à l’abolition de la peine de mort), 1989  X
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, 1984  23 septembre 1988
Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autre peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants, 2002  26 juin 2011
Convention Internationale relative aux droits de l’enfant, 1989 30 janvier 1992

Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples

1983

Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant

Signée (16 juin 1995) mais non ratifée

Vote à la Résolution de l’Assemblée générale des Nations unies appelant à un moratoire universel sur l’application de la peine de mort

 

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